L’ataxie est un trouble neurologique peu connu des propriétaires de chats. Pourtant, il s'agit d'un symptôme relativement fréquent en consultation vétérinaire : elle se traduit par une altération de la coordination des mouvements volontaires et peut concerner les pattes, la tête, les yeux, ou même la posture globale. L’ataxie chez le chat n’est pas une maladie en elle-même, mais le signe d’un dysfonctionnement plus profond du système nerveux. Certaines formes sont réversibles, d’autres évolutives. Comprendre les causes et les types d’ataxie permet de mieux orienter la prise en charge vétérinaire.
Le terme "ataxie" vient du grec a-taxis, qui signifie « absence d’ordre ». Il décrit une perte de coordination des mouvements volontaires, indépendante de toute faiblesse musculaire. Le chat atteint d’ataxie ne parvient plus à ajuster ses déplacements de manière fluide : ses pattes peuvent s’écarter, il peut tituber ou tomber, et sa tête peut présenter des mouvements involontaires.
Il existe trois formes principales d’ataxie chez le chat, en fonction de la région du système nerveux affectée.
Elle est liée à un dysfonctionnement du cervelet, une région du cerveau qui contrôle la posture, le tonus musculaire et la coordination fine. C’est la forme la plus spectaculaire : le chat présente une démarche "robotique", avec des gestes exagérés, des tremblements de la tête au moment de manger (tremblements intentionnels), voire des difficultés à rester debout.
Les causes peuvent être :
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une malformation congénitale (notamment due à une infection in utero par le virus du typhus),
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une tumeur du cervelet,
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un accident vasculaire cérébral,
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une inflammation d’origine infectieuse.
Le système vestibulaire régule l’équilibre et la position de la tête dans l’espace. Il est composé d’une portion périphérique (oreille interne) et d’une portion centrale (tronc cérébral). Une atteinte vestibulaire se traduit souvent par :
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une inclinaison de la tête,
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un nystagmus (mouvements oculaires involontaires),
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des tournis ou des chutes,
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une démarche circulaire.
Parmi les causes on retrouve : otite interne, tumeur, inflammation, accident vasculaire cérébral, syndrome vestibulaire idiopathique.
Cette forme est liée à une lésion de la moelle épinière qui perturbe la perception de la position des membres. Le chat ne "sait plus" où sont ses pattes, ce qui entraîne une démarche traînante, des chutes ou un mauvais placement des membres. Les causes fréquentes sont :
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traumatisme vertébral,
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hernie discale,
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tumeur ou compression,
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myélite.
La démarche anormale est le signe le plus visible. Mais d’autres symptômes peuvent alerter :
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Perte de l’équilibre, chutes fréquentes
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Sauts mal coordonnés
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Tête penchée d’un côté
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Yeux qui bougent de façon saccadée (nystagmus)
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Démarche en crabe ou en cercle
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Mouvements exagérés des membres (ataxie cérébelleuse)
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Tremblements, surtout lors des repas
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Paralysie partielle ou totale (formes médullaires sévères)
Ces signes apparaissent parfois de manière brutale, notamment en cas de traumatisme ou d'otite interne aiguë. Dans d’autres cas, l’ataxie peut être chronique ou évoluer lentement, comme dans les maladies neurodégénératives.
L’ataxie peut avoir de nombreuses origines. Voici un aperçu des principales catégories.
Certains chatons naissent avec des malformations du cervelet ou des troubles neurologiques d’origine génétique. Cela concerne surtout les races comme le Bengal, le Persan ou le Maine Coon.
Des infections virales (typhus, coronavirus, FIV, FeLV), bactériennes ou parasitaires peuvent entraîner une inflammation du système nerveux central. La péritonite infectieuse féline (PIF) neurologique (forme sèche) est une cause fréquente d’ataxie progressive chez le jeune adulte.
L’ingestion de produits neurotoxiques (insecticides, médicaments humains, rodenticides, etc.) peut provoquer une ataxie aiguë, souvent associée à des convulsions ou à une hypersalivation.
Une chute, un choc avec une voiture ou une morsure peuvent entraîner un traumatisme crânien ou une lésion vertébrale compressive.
Les tumeurs affectant le cerveau, la moelle épinière ou l’oreille interne (ex : polype nasopharyngé chez le jeune chat) peuvent générer une ataxie progressive, souvent unilatérale.
Un AVC chez le chat est plus rare que chez l’humain, mais peut affecter le cervelet ou le tronc cérébral et provoquer une ataxie soudaine.
Dans certains cas, aucune cause n’est retrouvée malgré un bilan complet. On parle alors d’ataxie idiopathique. Cette forme, souvent bénigne, est bien connue chez le vieux chat qui présente un syndrome vestibulaire sénile transitoire.
Lorsqu’un chat présente une ataxie, le vétérinaire réalise un examen neurologique complet pour localiser la lésion (cerveau, oreille interne, moelle). En fonction des signes, il peut recommander :
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Un bilan sanguin et recherche d’infections
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Une IRM ou un scanner (pour visualiser cerveau, oreille interne, moelle)
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Des radiographies du rachis
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Une analyse du liquide céphalo-rachidien (ponction lombaire)
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Une otoscopie sous anesthésie
Ces examens permettent de distinguer les différents types d’ataxie et d’orienter le traitement.
Il n’existe pas de traitement unique de l’ataxie, car tout dépend de la cause. Voici les grandes lignes des options thérapeutiques.
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Antibiotiques ou antifongiques en cas d’infection
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Corticoïdes ou AINS si inflammation
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Anti-nauséeux
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Anticonvulsivants si présence de crises associées
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Antiépileptiques dans les encéphalopathies
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Exérèse d’une tumeur ou d’un polype vestibulaire
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Décompression d’une hernie discale
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Rééducation fonctionnelle et kinésithérapie
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Aides à la locomotion (tapis antidérapant, harnais)
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Adaptation de l’environnement (litière accessible, gamelle surélevée)
Certaines plantes neuroprotectrices ou compléments peuvent être prescrits dans les formes dégénératives.
Un chat ataxique peut tout à fait mener une vie confortable, à condition d’adapter son environnement :
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Supprimer les escaliers ou installer des rampes
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Utiliser un bac à litière à bords bas
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Mettre les gamelles en hauteur pour faciliter la prise alimentaire
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Éviter les sols glissants
Certains chats s’adaptent étonnamment bien à leur condition ! Un chat avec ataxie cérébelleuse congénitale, par exemple, peut avoir une espérance de vie normale, même s’il garde une démarche atypique. L’important est de prévenir les accidents, d'assurer une stimulation mentale, et de garder un suivi vétérinaire régulier. Prenez rendez-vous en ligne dans l’une de nos cliniques vétérinaires.
En général, l’ataxie elle-même n’est pas douloureuse, mais elle peut être causée par une maladie sous-jacente douloureuse (tumeur, inflammation, otite). Un chat ataxique peut également se blesser plus facilement en tombant.
Il faut consulter rapidement un vétérinaire. Une perte d’équilibre soudaine n’est jamais à prendre à la légère, et peut indiquer une ataxie vestibulaire ou une autre affection neurologique nécessitant une prise en charge rapide.
Certaines formes d’ataxie chez le chat sont réversibles (infection, inflammation, otite), d’autres sont chroniques (malformation, tumeur). Une prise en charge précoce améliore fortement le pronostic.
Oui, avec un suivi vétérinaire adapté et un environnement sécurisé, un chat ataxique peut vivre heureux et en bonne santé. Il est même possible pour lui d’apprendre à vivre avec ses troubles de la coordination.